Dans la grande galerie des coups de gueule sportifs, on connaissait Éric Cantona et ses envolées philosophiques, ou Christophe Urios et ses uppercuts verbaux,Mais depuis un week-end de février 2012, un nouvel opus s’est imposé au panthéon du sport français : celui de Laurent Sciarra, coach des basketteurs de Vichy.
Quand le coup de gueule devient art majeur
Interviewé à chaud en sortie de match , cette tirade de sept minutes est un concentré de colère glacée et de lucidité désabusée. Le contexte ? Une nouvelle défaite de son équipe, bonne dernière du classement, contre Aix-Maurienne. Le décor est planté..
Et Sciarra, tel un chef d’orchestre, dégaine ses punchlines avec la précision d’un sniper. Parmi les meilleures perles :
- « Quand vous avez pas d’tueurs! Vous avez pas d’tueurs! »
- « D’un dauphin, t’en fais pas un requin. » Traduction : inutile d’espérer transformer des gentils garçons en tueurs sur parquet du jour au lendemain.
- « Mes mecs sont tellement sympas qu’ils vont jamais boire de bières entre eux. » Une attaque en règle contre l’absence de cohésion… et d’esprit de bande, pourtant fondamental pour survivre dans les bas-fonds du classement.
- Et l’inoubliable : « On a le temps d’être en vacances cet été, Copacabana ou mes couilles.« Une façon toute en subtilité de rappeler que l’heure n’était pas à la bronzette, mais au combat.
Cerise sur le gâteau, Sciarra ponctue sa prestation par un ultime avertissement : « Si les mecs sont pas contents, ils savent où est mon burlingue. » Bref, à Vichy, la porte est grande ouverte… pour aller discuter ou claquer la porte, selon l’humeur.
Crédits : LNB, JA Vichy Basket, | Laurent Sciarra
La JA Vichy 2012, mode galère activé
Et ce n’est pas un hasard si Laurent Sciarra a craqué : l’actualité du club de Vichy est, disons-le gentiment, aussi réjouissante qu’un lundi matin pluvieux en plein mois de novembre. La Jeanne d’Arc Vichy-Clermont Métropole, fruit d’une fusion en 2015 pour tenter de bâtir un projet solide en Pro B, traverse en 2012 une zone de turbulences sportives. Enchaînant les défaites comme un mauvais élève aligne les zéros, le club peine à exister dans un championnat de plus en plus relevé. Le collectif est en souffrance, l’adresse au tir en berne, et la défense ressemble parfois à une porte de saloon. Le pire ? Malgré les efforts du staff et les discours de son entraineur, la mayonnaise ne prend pas. Le Palais des Sports Pierre-Coulon, d’ordinaire bouillant comme une cocotte-minute, retient son souffle à chaque match, dans l’attente du déclic qui, se fera désespérément attendre.
« Quand vous avez pas d’tueurs! Vous avez pas d’tueurs! »
« D’un dauphin, t’en fais pas un requin. »
Laurent Sciarra, du joueur à l'entraîneur
Mais pour comprendre ce franc-parler et cette exigence, il faut aussi connaître le parcours du bonhomme. Laurent Sciarra, c’est d’abord un joueur au palmarès en or : meneur emblématique de l’équipe de France, il est l’un des héros de la médaille d’argent aux Jeux Olympiques de Sydney en 2000, où il termine meilleur marqueur de la finale face aux États-Unis. Passé par des clubs comme Paris Basket Racing, Pau-Orthez, ou encore Alicante en Espagne, il a toujours incarné un basket intelligent, engagé et sans tricherie. Sa reconversion sur le banc n’a rien changé à son ADN : que ce soit à Antibes, à Charleville-Mézières, ou aujourd’hui à Vichy, Sciarra prêche le même évangile du travail, du respect et de la sueur… quitte à secouer ses troupes façon shaker XXL quand il le faut.
Plus qu’un simple coup de gueule, cette séquence a tout d’un chef-d’œuvre d’authenticité. Sciarra y montre ce que beaucoup oublient : derrière le coach rugissant, il y a un homme qui refuse de baisser les bras. Même si, parfois, il faut hurler pour se faire entendre.
Crédits : LNB, JA Vichy Basket, Bellenger/IS/FFBB | Laurent Sciarra, S. Mantey/L’Équipe
