12 juillet 1998. Il est 22h45 quand la France retient son souffle une dernière fois. Puis vient le coup de sifflet final, le cri, la délivrance : “La France est championne du monde, vous le croyez ça?!”. Au micro, Thierry Roland explose. La phrase qui suit, lancée sans calcul, deviendra éternelle : « Je crois qu’après avoir vu ça, on peut mourir tranquille ! ».
Le soir où la France a basculé
Le Stade de France rugit, Saïd Belqola lève le bras : c’est fini. Trois buts – deux de Zidane, un de Petit – et tout un pays chavire.
Au micro de TF1, Thierry Roland laisse tout sortir : 40 ans de passion, de frustration, de désillusions et d’amour.
« Je crois qu’après avoir vu ça, on peut mourir tranquille ! Enfin le plus tard possible, mais on peut ! »
À ses côtés, Jean-Michel Larqué rit, souffle, se tait. Ce n’est plus un commentaire : c’est une libération. Ce soir-là, la France gagne une étoile et trouve sa voix.
Crédits : TF1, FIFA, FFF | Thierry Rolland, Jean-Michel Larqué. (Vidéo : Facebook Paris Première)
Crédits : France TV Sport | Patrick Montel
Le match dans le match
Pendant 90 minutes, Roland et Larqué vibrent au rythme des Bleus : une frappe hors-cadre de Dugarry qui fait casser les téléviseurs, un frisson sur Ronaldo, deux corners frappés comme des serments. Puis la délivrance. Dans l’oreillette, il paraît qu’on suggère de “laisser parler les images”, mais Roland ne peut pas. Le journaliste s’efface, le supporter prend le dessus. « Oh là là là là ! Quel pied ! Oh p*tain ! » lâche-t-il encore, avant de replonger dans le vacarme. Ce soir-là, il ne commente plus un match : il met des mots sur ce que ressent tout un pays avec une sincérité déconcertante.
» Oh là là ! Quel pied ! Oh putain ! «
Zidane, Petit, Belqola : la dramaturgie parfaite
On oublie souvent à quel point cette finale fut tendue. Ronaldo, annoncé souffrant, débute malgré tout. Zidane, lui, écrit sa légende en deux coups de tête chirurgicaux. Manu Petit clôt le bal, inscrivant le 1000e but de l’histoire des Bleus. Et au centre, un homme discret : Saïd Belqola, premier arbitre africain à diriger une finale de Coupe du monde. Une partition sans faute, un soir sans ombre. La France, elle, entre dans la lumière – et Paris découvre que la victoire peut durer jusqu’à l’aube.
Crédits : TF1, FIFA, FFF, Getty Image, Panoramic | Thierry Rolland, Jean-Michel Larqué
La voix d’un pays qui s'embras(s)e
Les images des Champs-Élysées en liesse, les klaxons, “I Will Survive” et le “Et 1, et 2, et 3 zéros” en fond sonore : tout s’enchaîne comme dans un rêve. On parle d’un pays réunit, d’une génération dorée, d’un Zizou triomphant sur l’Arc devenu président symbolique. Et dans cette chorale, la voix de Thierry Roland est la note guide : parfois fausse (personne n’est parfait), souvent forte, mais inimitable. Lui qu’on appelait “Monsieur Foot” aura commenté treize Coupes du monde et plus de mille matchs. Parfois controversé, toujours passionné, il incarnait ce que la télévision avait de plus vrai : la ferveur brute, sans filtre ni retouche.
Pourquoi sa phrase résonne encore ?
Parce qu’elle dit tout. L’innocence, la joie, la fatigue, l’amour du jeu. Parce qu’elle ne cherche pas la formule : elle jaillit. Parce qu’elle parle à tout le monde, de 7 à 77 ans. Ce soir-là, on a tous été un peu Thierry Roland : maladroits, débordés, vivants. En 2012, lorsqu’il nous quitte, sa voix et son rire iconiques reviennent dans les foyers : non pour parler de mort, mais de vie. Une vie passée à commenter, à vibrer, à transmettre, à aimer le foot.
